Focus sur la trace

Raphaël Zarka, Bille de Sharp n°4, 2008. Œuvre de la collection du Frac des Pays de la Loire. Crédit photographique : Marc Domage
Avec Bille de Sharp n°4, Raphael Zarka propose une œuvre à mi chemin entre la sculpture minimaliste et l'objet de travail en cours d'élaboration : une bûche parcourue de lignes pyrogravées qui signalent les découpes à suivre pour réaliser un polyèdre régulier, inspiré des planches Abraham Sharp, un astronome anglais du 18e siècle.
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Quai initial du port de Ratiatum. Fouille Inrap, Université de Nantes, Ville de Rezé - Photo de Jimmy Mouchard - 2015
Dans l'exposition, l’œuvre trouve un parallèle naturel avec le bois que l’on retrouve surtout lors de fouille archéologique en milieu submergé, puisqu’il a été utilisé par l’Homme depuis l’Antiquité dans la construction de structures côtières et en architecture navale. La xylologie est le nom donné à la science de reconnaissance et de classification des arbres. Cette science a permis d’étudier les bois découverts lors des fouilles des quais de Ratiatum, qui ont conservé les traces d’outils utilisés à l’époque antique.
L’étude et le façonnage de la matière se situent au cœur même du travail de l’archéologue et de l’artiste, le premier afin d’appréhender les savoir-faire du passé, le second les utilisant dans son processus créatif. Raphaël Zarka explique, dans un entretien accordé à la revue 20/27 en 2008, qu’il a pratiqué l’archéologie durant son adolescence, et affirme même : « J’ai choisi une orientation artistique dans le but d’étudier l’archéologie. J’ai bifurqué ».

Abraham Sharp's Polyhedra
Sculpteur, photographe et vidéaste, Raphael Zarka explore l’histoire des formes tel un collectionneur ou un archéologue. Son travail repose essentiellement sur des formes préexistantes : des formes géométriques appartenant au monde de l’art et de la science, mais aussi des objets scientifiques, historiques, artistiques, objets trouvés, objets du quotidien… Il reproduit, copie, reconstitue et regroupe ses objets selon leur forme. Il s’attache à les rassembler pour créer un répertoire. Il les collectionne, retrace leur histoire et construit un univers à la manière d’un cabinet de curiosités dans lequel les formes et les objets semblent être des outils de compréhension du monde.

Raphaël Zarka, Catalogue raisonné des rhombicuboctaèdres, 2016
Pour Raphael Zarka, il s'agit de redécouvrir ou de désigner plutôt que d'inventer ou de fabriquer. L’œuvre de Raphaël Zarka repose sur un postulat : il y a dans le monde un catalogue fini de formes dans lequel on peut sans cesse puiser. Ainsi, il renonce à imaginer de nouvelles choses et puise dans le monde des formes qui existent, comme les rhombicuboctaèdres, qu’il photographie et inventorie. Raphaël Zarka est un artiste-chercheur qui procède lentement au récolement de ces occurrences complexes.
Comme un boomerang est une exposition d’art contemporain présentée au Chronographe et conçue en collaboration avec le Frac des Pays de la Loire et le pôle de recherche archéologique de Nantes Métropole. L’exposition propose d’explorer les liens que peuvent partager l’art contemporain avec l’archéologie, en écho au parcours permanent du Chronographe, implanté sur le site antique de Ratiatum. Vingt trois d’œuvres d’artiste internationaux issues de la collection du Frac Pays de la Loire sont ainsi présentées du 9 février au 12 mai au sein de ce centre d’interprétation archéologique.
Par Pierre-Olivier Rollin, directeur du BPS22 Musée d'art de la Province de Hainaut dans le cadre de l'exposition "Riding Modern Art" du 02.09.2017 au 07.01.2018
Pour aller plus loin
La xylologie expliquée par l’Inrap
Dossier pédagogique de l’exposition Aurélien Froment et Raphaël Zarka aux Abattoirs en 2016-2017